top of page

L'impact sur les individus de la fragilisation des liens sociaux

Si la rupture du lien social ne constitue pas en soi et systématiquement, un risque pour l’individu, il n’en reste pas moins que sa capacité à en faire un processus positif reste largement déterminé par la densité et la solidité de ses ressources, personnelles et sociales. De sorte que pour les individus les moins « équipés », la fragilisation des liens sociaux est souvent une épreuve, qui peut accélérer le basculement vers l’exclusion sociale.

Contexte de fragilisation des liens sociaux, approche de Paugam

Pour Serge Paugam, deux évolutions majeures de nos sociétés contemporaines accroissent le risque de fragilisation des liens sociaux :

Le retour de l’insécurité sociale dans nos sociétés « développées », marquées par l’intensification et la généralisation du chômage, l’ancrage du sous-emploi, et la généralisation de la flexibilité dans les modes de production. Il parle de « crise de la société salariale », laquelle met à mal la mise en œuvre d’une solidarité opérationnelle.

Les formes de mépris social, qui se propagent de manière insidieuse, entrainent des souffrances quotidiennes, par lesquelles est éprouvée l’infériorité sociale, et induit un sentiment de déchéance personnelle pour ne plus être suffisamment reconnu et apprécié par la société à laquelle on appartient.



La fragilisation des liens sociaux, une forme de « petite misère » ?

On pense ici à la distinction introduite par Pierre Bourdieu entre la « grande misère », c’est-à-dire la misère de condition, visible, et la « petite misère », liée à des effets de position, et donc moins visible. Bourdieu considérait pourtant cette seconde forme de misère comme également importante dans la mesure où elle est présente dans tous les milieux sociaux. Bourdieu insistait ainsi sur le fait que notre société néolibérale a des effets sur la structuration du monde social, en « fabriquant » des individus malheureux à tous les niveaux de l’échelle sociale.

L’émergence d’une maltraitance sociale ordinaire

La fragilisation des liens sociaux entraîne un préjudice pour celui qui la subit c’est-à-dire une atteinte, un dommage à son intégrité d’être social. Il s’agit donc d’une forme de violence.

Cette violence est sociale car elle ne porte pas directement atteinte au corps. Et, si elle est vécue subjectivement, elle n’est pas tournée intentionnellement contre un individu en particulier. Elle est le produit du regard porté par le groupe dans son ensemble, ou par la portion dominante du groupe, sur un de ses maillons. En revanche, elle peut générer de la souffrance chez celui qui la vit, et cette souffrance peut avoir un impact fort au niveau du groupe social de référence.

On peut ajouter qu’elle est ordinaire, en ce sens qu’elle n’est pas immédiatement repérable par ses (dis)proportions.

Référence: Bourdieu Pierre, La misère du monde, Seuil, 1993, Paris

0 commentaire

Comments


bottom of page